Les lourdes défaites de la JS Kabylie face à Al Ahly (4-1) et du MC Alger contre Al Hilal ont déclenché une vague de réactions dans le monde du football algérien. Parmi les voix les plus entendues, celle d’Ali Bencheikh, ancien joueur du MC Alger et aujourd’hui consultant sur le plateau de El Heddaf, a particulièrement retenu l’attention. Fidèle à son franc-parler, l’ancienne star du football national a livré un diagnostic sans filtre, mêlant analyse sportive, critique structurelle et commentaires sur certains joueurs algériens évoluant en Europe, dont Anis Hadj Moussa.
Selon Bencheikh, la JSK a payé au prix fort certains choix effectués ces derniers mois. Pour lui, la direction n’aurait jamais dû procéder aux ventes de Boualia et Berkane, deux éléments clés dans un effectif engagé en Champions League africaine. « La JSK qui joue la Champions League ne devait pas vendre Boualia et Berkane », a-t-il insisté, pointant du doigt une stratégie sportive qu’il juge incohérente.
Il s’en est ensuite pris à la politique salariale, en prenant l’exemple de Ryad Boudebouz. « Boudebouz, qui joue à la JSK et qui est payé en euros, avec cet argent, je ramène deux joueurs africains meilleurs que Boudebouz, âgés entre 20 et 22 ans », a-t-il lancé. Pour lui, l’investissement doit être fait sur des joueurs en pleine ascension, capables d’apporter intensité, vitesse et progression. Dans la même logique, il critique le salaire de l’entraîneur Zinnbauer : « Son salaire est très très élevé, il touche 45.000 euros. Le principal, c’est de ramener des joueurs de niveau, pas un entraîneur. Ce sont les joueurs qui font l’entraîneur. »
Bencheikh n’a pas non plus compris certains choix tactiques, notamment la mise sur le banc de Mahious au coup d’envoi. « Il fallait le faire jouer d’entrée, il peut peser sur la défense adverse. Je ne comprends pas ce choix de Zinnbauer », a-t-il déclaré. Il a également dénoncé la liberté totale dont a bénéficié Trezeguet, joueur d’Al Ahly : « Il faisait tout ce qu’il voulait », résume-t-il.
Concernant le MC Alger, battu par Al Hilal, Bencheikh s’est montré clair : la marge d’erreur est désormais nulle. « Les matchs restants pour le MC Alger, il ne faut pas qu’il y ait de défaite », a-t-il averti, rappelant que perdre à nouveau compromettrait sérieusement leur campagne continentale.
Au-delà des performances sportives, Bencheikh a élargi son propos à la politique générale du football en Algérie. Il estime que le modèle actuel, entièrement financé par des entreprises étatiques, ne permet pas la construction d’un football compétitif. Avec une comparaison marquante, il décrit la situation ainsi : « En Algérie, ce sont des entreprises étatiques qui financent des clubs, c’est comme quand on donne de l’argent à des petits enfants pour dépenser. » Selon lui, prétendre rivaliser avec des clubs comme Al Ahly est illusoire : « Il ne faut pas comparer nos clubs à Al Ahly. Eux, on peut les comparer à Nice, Marseille », a-t-il estimé, affirmant que l’écart structurel est trop important.
Sur un autre registre, Bencheikh a longuement commenté la situation de certains joueurs algériens évoluant en Europe, notamment Hadj Moussa, au cœur d’une polémique après les critiques sévères de Robin Van Persie, son entraîneur à Feyenoord. Van Persie, jugeant que le joueur n’avait pas respecté ses tâches défensives, avait déclaré qu’il n’était « pas à la hauteur » malgré une passe décisive. Bencheikh n’a pas apprécié la communication du coach néerlandais, s’interrogeant sur son insistance à parler de son joueur algérien après chaque match. Il a également critiqué les propos de Van Persie lorsqu’il avait comparé Hadj Moussa à Riyad Mahrez, affirmant ne pas croire que son joueur puisse concurrencer la star algérienne : une déclaration que Bencheikh juge totalement déplacée.
Il a aussi évoqué Ibrahim Maza, joueur de Leverkusen, saluant son comportement et l’éducation qu’il a reçue, qu’il décrit comme exemplaire. Bencheikh a conclu son intervention avec une note plus positive en soulignant l’importance du retour d’Adam Ounas, convoqué en équipe d’Algérie A’ pour la Coupe arabe, estimant qu’il apportera une vraie plus-value offensive.
Au final, l’intervention d’Ali Bencheikh aura été à la fois un cri d’alerte et un appel à la restructuration. Entre critiques des choix sportifs, dénonciation des modèles économiques et inquiétudes pour le développement des talents algériens, son discours met en lumière un problème plus profond : le retard structurel du football algérien face à des adversaires mieux organisés, mieux financés et plus exigeants.
